Études de mobiliers sur des sites de la plaine de Bas-en-basset, entre Âge du fer et époque romaine

romain lauransonPar Romain Lauranson

Mon intérêt pour la recherche archéologique en Haute-Loire découle en grande partie du retard des connaissances dans ce département vis-à-vis des départements voisins. Il s’est concrétisé par un projet de recherche d’archéologie spatiale, dont le but est d’appréhender l’évolution de l’occupation des sols par les sociétés humaines du passé sur un territoire donné ; il importait de sélectionner cette « micro-région » en fonction notamment du contexte archéologique.

Mon choix s’est porté sur la plaine de Bas-en-Basset, en incluant pour partie les communes de Monistrol-sur-Loire et Beauzac ; cette fenêtre d’étude comportait un corpus de découverte relativement riche (Figure 2), situation hautement redevable au travail de chercheurs précédents tels que L. Simonnet et Y. Theillère. Tributaire du potentiel connu, le cadre chronologique comprend l’âge du fer, l’époque romaine et le haut Moyen Âge.Le travail réalisé en Master 1 a visé à un bilan des connaissances archéologiques, mettant en évidence la multitude de problématiques soulevées par ces quelques 80 points de découvertes ; y ont été adjoints la prise en compte de la toponymie ainsi que celles des sources textuelles médiévales. De même un développement conséquent a été consacré aux problèmes environnementaux, certaines questions s’avérant cruciales : défrichement et reboisement des coteaux, déplacement du tracé de la Loire, etc… Ce travail a enfin été l’occasion de réfléchir à une méthode d’investigation de terrain adaptée, à savoir la prospection pédestre systématique, qui reste malheureusement contrainte par la faible proportion de surfaces cultivées.

Un virage amorcé en Master II m’a conduit à abandonner pour un temps les recherches sur le terrain pour me consacrer à l’étude du matériel archéologique, et en particulier la céramique. Les collections étudiées sont issues de ramassage en prospections sur trois sites ne natures et de datation diverses (Figure 2). Le premier, Basset, est un site de l’âge du fer logé au fond de la plaine correspondant vraisemblablement au tout premier groupement d’habitat du secteur. Le deuxième, le Mont-Malorum, est un site de hauteur de la fin de l’âge du fer pour partie enserré par un ouvrage défensif. Enfin, le site de gallo-romain de Champ-Ferrier correspond vraisemblablement à une petite villa déjà occupé à la fin de l’âge du fer.

Plaine de bas-en-basset découvertes archeologiques

Figure 1 : La plaine de Bas-en-Basset, ensemble des découvertes archéologiques recensées et sites dont le mobilier a été étudié.

Les résultats ont été à la hauteur de l’investissement en temps. Pour l’habitat gaulois de plaine de Basset, inventé par L. Simonnet et H. Savay-Guerraz dans les années 70, Il a fallu réexaminer plus de 2000 tessons de céramique (Figure 3), en collaboration avec M.-C. Kurzaj. La chronologie du site a été complètement révisée : alors qu’une unique période d’occupation à la fin de la Tène (soit aux deux premiers siècles avant n. è.) était proposée, nous avons clairement mis en évidence une occupation du IIème siècle s’achevant au alentours de 100 avant n. è. précédée d’une phase d’occupation au Vème siècle.

Céramiques du IIeme siecle av notre ère du site de Basset

Figure 2 :  Exemples de céramiques du IIème siècle av. n. è. du site de Basset : céramiques gauloise, formes basses (écuelles, coupes), formes hautes (vases ovoïdes, vases bouteilles), céramique peinte ; mobiliers d’importation (amphore vinaire italique et anse de cruche de la côte catalane). Echelle 1/6, sauf amphores au 1/8.

En ce qui concerne l’habitat de hauteur du Mont-Mallorum, son occupation s’avère nettement circonscrite au Ier siècle avant J.-C. A la lumière de comparaisons profitant des progrès de la recherche sur quelques décennies, notamment en Auvergne, l’étude des mêmes artefacts offre des résultats plus précis, et permet de postuler la succession dans le temps de deux pôles d’habitat de nature différente, un premier en plaine connaissant son apogée au IIème s. av. n. è., puis en site fortifié en position dominante (Figure 1). La plaine de Bas-en-Basset rejoint ainsi une problématique majeure de la recherche protohistorique à l’échelle de la Gaule celtique, celle de la genèse et de l’évolution des pôles d’habitat à la charnière entre le IIème et le Ier siècle avant notre ère. La question des dynamiques d’évolution de ces agglomérations est loin d’être épuisée dans cette plaine, puisqu’à la suite de Basset et du Mont-Mallorum qui restent méconnus en l’absence de fouilles, un troisième pôle d’habitat semble se développer au Haut-empire à l’emplacement du bourg actuel de Basset.

Vue aerienne restituée de la plaine de Bas-en-Basset - mont Malorum

Figure 3 :  Vue aérienne restituée de la plaine de Bas-en-Basset depuis le nord-est, situant les deux sites de l’âge du fer de Basset et du Mont-Malloru, et le site du bourg de Bas-en-Basset. Source : géoportail 2008, IGN

Pour le site de Champ-Ferrier, l’étude n’a fait que confirmer la datation proposée par son inventeur, une première phase à la fin de l’âge du fer, et une occupation continue depuis le changement d’ère jusqu’à la fin du IIème siècle. L’absence de fouilles est bien évidemment là encore handicapante, mais les mobiliers illustrent ici le cas d’un habitat rural pérenne touché par la romanisation. L’étude des mobiliers d’importation permet en outre de mettre en évidence l’intégration de la plaine de Bas-en-Basset aux circuits commerciaux antiques depuis la fin de l’âge du fer (Figure 2) : amphore vinaires italiques, espagnoles puis gauloises, amphores ou céramique en provenance de diverses régions de la gaule, etc.

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